tell me, think i'll give you up ? • jerrika

Damn, encore un matin de lendemain de veille. Par chance, cette fois, elle savait où elle était. Dans son propre lit, pour une fois. Cependant, Ryden fut dégoûtée de se retrouver à côté d'un homme. Bon, oui, elle lui donnait bien le beau physique de Dieu. Toutefois, ce n'était pas dans ses habitudes de ramener quelqu'un chez elle. Elle ne voulait pas se faire harceler par la suite. Ben oui quoi, après avoir goûté à l'entre-jambes de la belle, on a beau chercher partout ailleurs, rien ne ressemble à ce qu'elle peut offrir comme sensation. Alors elle préfère garder son identité secrète pour ne pas avoir à essayer un soulier de verre après chaque coup d'une nuit. Parce que oui, les hommes iraient jusqu'à la rechercher par n'importe quel moyen, tout comme le prince dans Cendrillon. Belle comparaison, vous ne trouvez pas ? Bref, Queen R. chercha à bout de bras sa brassière au sol, et quand elle attrapa enfin la fine dentelle noire, elle la releva vers elle avant de l'aggrafer dans son dos. Une fois ses petites culottes remises, elle sortit du lit et se dirigea vers la salle de bain. Elle examina son corps, encore couvert d'ecchymoses, comme à chaque fois qu'elle allait dans une boîte de nuit. Ryden ne se souvenait jamais de ce qu'elle faisait, mais chaque fois qu'elle se saoulait la gueule, elle n'en ressortait pas en parfait état. Ce que les hommes peuvent être violents, quand ils le veulent vraiment. Même sans s'en rendre compte, parfois, même. Ryden regarda son reflet dans la glace. Elle avait des cernes, ses cheveux crêpés de la veille lui donnait un air de lionne et son maquillage avait coulé tout le long de ses joues et autour de ses beaux yeux bleu-vert. Elle passa un coup de peigne dans sa tignasse dorée et se lava le visage avant de revenir dans sa chambre. Elle s'assit sur le bord du lit et commença à brasser doucement l'inconnu. Quand il ouvrit doucement les yeux et se releva un peu sur ses coudes pour l'embrasser, elle mit son index sur les lèvres de l'homme et haussa un sourcil en souriant.

« Non, non. Il est temps que tu partes, j'ai des invités pour le petit-déjeuner. »

Le message fut très clair. L'homme se releva donc, l'air bougon, renfila ses fringues de la veille et quitta l'appartement sans demander son reste. Ryden se posta à la fenêtre, tira le rideau et le regarda s'éloigner. Elle ne manqua rien de son manège; d'un rapide coup d'oeil, il avait incliné la tête vers le numéro de la porte et avait continué son chemin, ni vu ni connu. Enfin, ça, c'était ce qu'il pensait. Amusée, elle se rendit de nouveau à la salle de bain, les bras encombrés de vêtements, et elle se doucha. Une fois sa toilette faite, Ryden, resplendissante en ce dimanche ensoleillé, quitta sa résidence sans même prendre la peine de prendre un petit quelque chose à manger. Moins de calories par jour la ferait certainement maigrir. En plus, avec tout ce qui se retrouve comme sucre dans l'alcool qu'elle avait ingurgitée hier au soir, elle devait bien se calmer un peu au courant de la journée. La demoiselle prit sa voiture, une Mercedes éclatante de nouveauté, et roula jusqu'aux rues principales de la ville. Un peu de shopping lui remonterait certainement le moral, qui ces derniers temps, était à son plus bas, sans raison. Elle se gara dans un stationnement réservé aux clients d'un restaurant africain et enfila ses talons-aiguilles au lieu de ses bottines noires simples pour conduire. Première boutique dans son champ de vision : Escada. La FashionLine favorite des femmes qui ont du goût, mais surtout qui ont de l'argent. Money, money, quand tu nous tiens. Ryden tira la porte et salua la vendeuse qu'elle connaissait bien à force de venir. C'était une vraie garce et de nombreuses rumeurs couraient à son sujet. Apparemment, elle aurait aguiché un mec toute une soirée, et ce dernier aurait fini par la violer. Suite à ce scandale, elle aurait avoué à des copines moyennement fiables qu'elle était tombée enceinte. Tout le blâme retombait sur ce pauvre mec. Franchement, c'était la faute de cette saloppe de vendeuse. Ryden la regarda de bas en haut en la saluant avec un sourire en coin. Elle commença à traverser le rayon des parfums, quand elle aperçut au bout de l'allée, sa chère ancienne amie, Jerrika Schweitzer. Ryden se dissimula légèrement devant un mannequin portant une tonne de bijoux et l'observa faire son shopping. Elle était pitoyable. Autrefois, Jerrika aurait porté des vêtements griffés des plus grands designers et serait surmontée de talon-hauts extravagants. Aujoud'hui, sa tenue n'était pas des plus égocentriques et elle ne dévoilait aucune parcèle intime de son corps. Ryden la détestait pour avoir délaissé la vie de la nuit. Elles s'entendaient à merveille, avant qu'elle ne devienne une sainte-nitouche. Mine de rien, Queen R. tentait de la faire retomber du côté sombre, sans toutefois laisser paraître ses intentions. Après avoir vu que la jeune femme essayait des parfums qui n'attireraient jamais un seul homme sur cette planète, O'Haara décida d'intervenir. Elle sortit donc fièrement de sa cachette, comme si de rien était, et s'approcha de son ancienne amie.

« Jerri, chérie ! Quelle belle surprise ! Ben pourquoi tu m'as pas appelée pour que je t'accompagne ? Je pourrais te conseiller en parfum, parce que ce que tu tiens là ma belle, c'est pas une perle rare. »

Ryden prit la jeune femme par le poignet et l'éloigna de ce rayon de parfums trop commerciaux qui commençaient à se démoder à vive allure. Elle retourna à son endroit initial de shopping à elle et parcourut des yeux les fragrances. Elle en prit une avec une bouteille en forme de goutte d'eau et en projeta sur le poignet de son "amie".

« C'est mieux, tu ne trouves pas ? Va vraiment falloir que je te réenseigne tout, hein ? »

Ryden fit un clin d'oeil à Jerrika.

Ah Ryden, je ne voulais pas te dérangée, je ne faisais que mon shooping du dimanche

Je crois pas vraiment que ce soit mon genre. Faudras pas un truc plus doux. Je sais pas, ce parfum fait ; raaa, je suis une tigresse et je saute sur tout ce que bouge

À vingt et un ans, Ryden jugeait qu'il était trop tôt pour être sage. Vous savez, quand on parle de sagesse, on associe beaucoup avec l'âge d'or. Voilà pourquoi la demoiselle se voyait mal être une femme tranquille, réservée et organisée. Sinon, quand est-ce qu'on pourrait s'amuser ? Durant notre enfance, d'accord, c'est le temps du bac à sable. Seulement, essayez de vous rappeler de tout ce que vous y faisiez et disiez. C'est loin, très loin, et beaucoup trop innocent. Des bisoux sur la joue, des jeux de rôle, des rires enfantins, un monde imaginaire. Durant l'adolescence, on comme à s'émanciper, à se sentir belle, à goûter les vrais plaisirs de la vie. Cependant, il y a toujours un risque de se faire coincer. Que ce soit par les parents ou les autorités. À 21 ans, âge exact de notre belle Ryden, presque tout est permis. C'est le moment de se sentir complètement libre de vivre comme bon nous semble. Et ce "comme bon nous semble" ne comprenait certainement pas le nouveau mode de vie de l'ancienne amie de Ryden, j'ai nommé Jerrika O. Schweitzer. Elle se tenait là, à quelques mètres d'elle, à choisir dans les parfums commerciaux. Les parfums que ces femmes mariées qui travaillent à la maison achètent, quand elles tentent en vain de reconquérir leurs maris lassés par ce train-train quotidien déroutant et ennuyeux. Ces maris qui, pour se redonner un peu de jeunesse, retournent voir des filles comme Ryden, qui savent vivre. C'est une triste histoire que pourtant tout le monde connaît parce qu'elle se répète sans arrêt. Over and over again. Alors pourquoi n'apprennent-elles pas de leurs erreurs ? Les filles sont parfois si stupides, quand elles le veulent bien. C'est pourquoi Queen R. ressentit le besoin urgent d'intervenir auprès de cette situation plus qu'embarassante. La blondasse s'approcha ainsi de Jerrika, feignant de ne pas lui en vouloir d'avoir reculé et d'avoir changé. Tout ça pour quoi ? Pour ce baiser qu'elles avaient échangé innocemment ? Quoi, croyait-elle que Ryden était amoureuse d'elle et qu'elle lui demanderait de l'épouser ? Franchement, ce n'était pas comme si elle avait été son genre. Jerrika était belle, surtout lors de cette soirée arrosée, et Ryden avait eu comme l'envie de mêler son alcool à la sienne. Après, ça c'était arrêté là, un point c'est tout. Les lycéens en avaient parlé pendant une journée, après l'histoire s'était envolée, comme tous les scandales que Ryden&Jerrika arrivaient à former. Seulement, celui-là avait été le dernier. Après, la brunette était devenue une sainte-nitouche, la vierge Marie ressucitée de ses propres cendres. Ryden ne comprenait pas, tout simplement pas. Alors aujourd'hui, c'était avec dégoût qu'elle osait lui parler pour lui venir en aide. Je ne vous cacherai cependant pas que des cornes se cachaient devant son air angélique. Ses sourires et ses conseils n'étaient pas innocents. Elle comptait bien la ramener de son côté, le côté noir, le côté sombre.

Avant, ton shopping du dimanche était également le mien. Et tu sais bien que tu ne me déranges jamais. J'te dis pas si ça avait été cette pouffiasse de Jordan, mais toi, tu sais bien que je ne te refuserais jamais quelque chose ! »

Ryden aimait bien en mettre un peu trop, juste pour voir les joues de son ancienne amie s'empourprer. Cette histoire de baiser l'embarassait, ça se sentait à plein nez. L'embêter, la blondasse le faisait à coeur joie. Surtout qu'elle était une si bonne comédienne qu'il aurait fallu être un détective privé pour découvrir son petit manège assez machiavélique. Queen R. empoigna donc Jerrika et la tira de force sans préavis jusqu'à son rayon favori. Le rayon qu'elles auraient fréquentées ensemble, quelques années auparavant. Elle aspergea les frêles bras de la brunette d'une odeur magnifique qui donnait réellement envie de sauter sur la personne qui le portait.

« C'est exactement ce que tu es, Jerrika, non ? En tout cas, c'est ce que tu devrais être ... »

Ryden poussa un soupir de mécontentement et reposa le flacon de parfum sur le comptoir vitré avec une moue légèrement offusquée. Elle avait été assez abrupte sur la dernière phrase. Elle croisa les bras et recommenca à fouiner dans les rangées de petites bouteilles de différentes formes et grosseurs. Après deux secondes et demi, elle en extirpa une deuxième de son emballage et en aspergea dans le vide. La fragrance rappelait le paradis qu'étaient les Îles Fidji. Un mélange d'océan, de sable chaud, de soleil, de bel homme et d'oasis de paix. Ryden était amoureuse de ce parfum, et de toutes les personnes qui le portaient.

« Si tu me dis que ça, ça ne te correspond pas, alors c'est que tu seras vraiment devenue un cas désespéré. »